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En vedettes

  • Les personnes âgées ont besoin de moins de sommeil; elles finiront forcément par être atteintes de démence si elles vivent assez longtemps; elles ne devraient pas faire d’exercice intense de peur de se blesser.

  • Pour Tony Cond, écrire son mémoire a constitué une révélation. « J’ai vraiment eu une belle vie », dit-il avoir compris une fois son livre terminé. « Ce livre est l’aboutissement de ma capacité à me le dire. » 

  • Comment savoir s’il est temps de ranger ses clés de voiture pour de bon? À vos 80 ans? Après un accident vasculaire cérébral? Quand vos enfants vous prennent à part pour vous dire : « Il faut que tu arrêtes de conduire »? 

  • Arrivés à un certain âge, la plupart d’entre nous possèdent de précieux albums photos, et peut-être même quelques boîtes à chaussures remplies de souvenirs épars. Et que dire de ces cassettes ou bobines que vous ne pouvez plus lire, faute d’appareil adapté?

Écrire son mémoire, une démarche cathartique et stimulante

Deux membres ayant rédigé leurs mémoires et une accompagnatrice spécialisée partagent leurs réflexions sur l’art de l’écriture autobiographique. 

Pour Tony Cond, écrire son mémoire a constitué une révélation. « J’ai vraiment eu une belle vie », dit-il avoir compris une fois son livre terminé. « Ce livre est l’aboutissement de ma capacité à me le dire. » 

Disons qu’il peut y avoir pire qu’en venir à cette réalisation après s’être replongé dans son passé.

M. Cond, qui est retraité de la Marine royale canadienne, a publié son mémoire intitulé Rigged: The Misadventures of a Classic Wooden Sailboat [traduction libre : Gréé pour le pire — Les mésaventures d’un voilier classique en bois] à compte d’auteur plus tôt cet été. Le livre raconte la relation de sa famille avec un voilier classique en bois de 1947 baptisé Rufus, et le retour inattendu de ce bateau dans la vie de M. Cond après une longue disparition.

Mûri avec passion depuis 2007, son mémoire compte plus de 82 000 mots et est disponible en librairie à Victoria, en Colombie-Britannique, où il réside, ainsi que sur Amazon et ailleurs. 

Rares sont les mémoires qui finissent sur les rayons des librairies, mais l’envie d’en écrire séduit manifestement beaucoup de gens. Les universités, les bibliothèques municipales, les cercles d’écriture et d’autres groupes proposent des ateliers et de l’accompagnement sur l’art de rédiger un mémoire. Internet regorge de tutoriels et de vidéos explicatives, et les livres sur le sujet abondent.
 

Se lancer dans l’écriture de son mémoire

Que devez-vous savoir avant de vous lancer? 

Contrairement à une autobiographie, qui cherche à évoquer l’ensemble d’une vie au lieu de transmettre des événements ou des thèmes précis et marquants, un mémoire « est une récompense » pour son auteur, souligne Viviane Edwards. Cette professeure émérite en éducation à l’Université du Nouveau-Brunswick à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, anime des cercles d’écriture de mémoire depuis plus de douze ans. 

« Pour les gens comme moi, qui avancent en âge, se souvenir des moments de notre vie que l’on souhaite revisiter, examiner, analyser et revivre [suscite ces questions] “Pourquoi ai-je fait cela? Pourquoi ne l’ai-je pas fait?”. Écrire un mémoire nous oblige à y penser. Pour beaucoup, c’est à la fois cathartique et stimulant. »

M. Cond, qui a passé de nombreuses heures avec son père sur le bateau, partage ce sentiment. « J’ai pris tellement de plaisir à me souvenir… C’était thérapeutique, car j’ai commencé peu après le décès de mon père. »

Tony Cond navigue à bord du Rufus par beau temps.
Lorsque Tony Cond a commencé à écrire sur le voilier de famille familial — un superbe bateau en bois de 1947 baptisé Rufus —, il ne s’attendait pas à vivre une expérience aussi transformatrice.

Si vous envisagez de rédiger un mémoire, que ce soit pour célébrer un aspect marquant de votre vie, pour vous aider à surmonter un événement traumatisant ou déterminant, ou pour transmettre une partie de vos expériences à vos descendants, il est essentiel de choisir un sujet qui vous tient à cœur et de ne pas éviter les vérités qui dérangent. 

« Commencez par l’histoire qui vous obsède, pas par votre naissance », conseille Mme Edwards. « Ayez quelque chose à dire. »

Plutôt qu’une narration en ordre chronologique, votre mémoire doit aussi transmettre votre vécu des événements. La charge émotionnelle est essentielle. Pour donner de l’authenticité et du poids à votre récit, vous devez dévoiler votre vulnérabilité, vos erreurs, vos échecs, vos crises et partager vos réflexions. 

Et si vous versiez dans l’autocomplaisance? « Vous êtes le héros de votre histoire… écrivez-la comme vous le souhaitez », conseille Mme Edwards.

Chaque auteur devra déterminer lui-même s’il a basculé dans un registre embarrassant, mais un regard extérieur sur votre brouillon pourrait vous aider à le déterminer. Un lecteur pourra aussi repérer les passages flous, les lacunes narratives et les nombreux pièges qui guettent tout écrivain, qu’il soit amateur ou professionnel.
 

Réécrire : une méthode pour réévaluer

Pour Paul Bennett, la réécriture profonde et l’expansion de son mémoire ont permis d’en clarifier le contenu. À la retraite après avoir fait carrière au sein d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et d’autres directions de la fonction publique fédérale, ce résident d’Ottawa a rédigé la première version de son mémoire pendant les journées propices à la réflexion qu’avait imposé la pandémie de COVID-19. 

« J’estimais avoir quelque chose d’intéressant et d’utile à dire », explique M. Bennett. « De plus, je voulais que les lecteurs sachent que, même si nous ne naissons pas tous dans une situation enviable, bon nombre d’entre nous ont des possibilités qui se présentent à nous. Je les encourage à les saisir. Je voulais aussi partager certaines de ces expériences avec ma famille élargie. »

Après avoir publié son mémoire en 2021, il a décidé de tenter l’aventure avec une maison d’édition traditionnelle. Cela a impliqué des recherches exhaustives, l’ajout d’histoires, la suppression de passages jugés non pertinents, et l’intégration de photos et de notes de bas de page (une tâche énorme, souligne-t-il). 

La réécriture du livre, désormais intitulé Witness to Worlds: Lives of Duty, Discovery, and Resilience [traduction libre : À la croisée des mondes : vies de devoir, de découverte et de résilience], d’un volume de 50 000 mots, a exigé six mois de travail acharné. Le résultat combine des réflexions sur les lieux qu’il a visités ou où il a travaillé, des événements internationaux majeurs, ainsi que des anecdotes personnelles et familiales. Il espère maintenant qu’une maison d’édition acceptera son manuscrit. 

Comme Mme Edwards, M. Bennett insiste sur l’importance du contexte dans les mémoires, ajoutant que son livre illustre comment ses expériences personnelles se sont croisées avec des contextes historiques et culturels plus vastes. 

La rédaction d’un mémoire présente de nombreux défis, comme ne pas avoir pris de notes au moment des événements, trouver du temps pour réfléchir et écrire, rassembler les détails, faire preuve de rigueur lors de la révision et, simplement, persévérer dans la démarche. 

Pour surmonter les obstacles, Mme Edwards recommande de respecter un horaire d’écriture strict. Un « système de tandem » — deux personnes qui écrivent chacune dans une pièce différente, font une pause pour le dîner, puis reprennent l’écriture — peut aussi stimuler la motivation et la créativité.

Au bout du compte, elle se veut rassurante : « Nous sommes juste des gens qui racontons nos histoires. » 
 

Conseils et ressources

  • Soyez prêt à partager vos émotions, vos vulnérabilités et vos réflexions. C’est ce qui permet aux lecteurs de s’identifier à votre histoire.
  • Laissez de côté les contraintes liées à la chronologie ou à des thèmes : un recueil d’histoires distinctes peut très bien fonctionner.
  • Créez des scènes et des dialogues, si cela aide à donner du relief à vos récits.
  • Souvenez-vous des mots de Polonius dans Hamlet : « Sois fidèle à toi-même. » 


Lien utile

Comment écrire ses mémoires : guide pratique pour commencer - Article du magazine InterMiTemps donnant des conseils étape par étape pour transmettre votre histoire. 

Rédacteur établi à Ottawa, Patrick Langston a été si occupé à écrire sur les autres qu’il n’a jamais envisagé de rédiger son propre mémoire. Il pourrait bien s’y mettre un jour.